Is that how you felt when you turned thirty ?

Un jour, ma mère est venue me chercher au collège, je devais être en 4ème. Je suis montée dans la voiture et elle m’a dit ‘je suis tellement fière que ce soit toi ma fille’. Je lui ai demandé ce qu’elle voulait dire, elle m’a répondu ‘ben tu vois j’observais tous les élèves qui passaient quand je t’attendais, je trouvais qu’ils se ressemblaient tous et qu’aucun ne sortait du lot. Et puis je t’ai vue, on te distinguait bien parmi tous ces ados semblables’.

Je pense que c’est le plus beau compliment qu’elle m’ait jamais fait. Je pense aussi que ça me définit très bien. J’ai toujours ressenti cette différence mais au final ça a toujours été une force, quasiment tout le temps disons.

J’ai bien essayé, à cette même époque d’ailleurs, de rentrer dans les codes des autres pour ne plus recevoir de remarques un peu relou. Mais finalement j’ai tenu à peine un mois, je me sentais déguisée et j’avais l’impression de me trahir moi-même.

Je suis différente, et j’aime me dire que je suis presque unique. Dans une conversation lambda, je suis souvent la seule qui n’est pas d’accord, je ne suis pas la pensée générale si elle ne me convient pas. Je ne suis pas un mouvement qui ne me correspond pas. Je ne dis pas blanc quand je pense noir.

Je suis différente, mais pour moi, c’est dans le bon sens du terme.

La fille pas romantique, la fille qui fait une blague en toute circonstance, même à la banque, la fille qui sourit dans les embouteillages et qui dit bonjour même à ceux qui ne répondent jamais. La fille qui adore le lundi matin (enfin en ce moment moins, mais c’est une nouveauté), la fille qui ne rêve pas de tour du monde, la fille qui se réjouit de la routine quotidienne. La fille qui adore quand les gens mettent trop de parfum et qui aime l’haleine de clope.

Au fil de ma vie, je suis heureuse d’avoir croisé des gens un peu comme moi, un peu à côté de la plaque, avec des failles. C’est ce que j’aime le plus chez mes amis, chez ceux que j’aime, leurs failles.

Les gens qui pensent bien comme il faut, qui disent des phrases bateau pour meubler les blancs, les gens qui ne suivent pas leur cœur, en général, on n’accroche pas eux et moi.

Parfois c’est un peu compliqué de se présenter aux gens en étant dans absolument aucune case, mais en essayant de les intéresser quand même.

La maternité, la vie de couple, l’amitié, la politique, j’ai l’impression que je fais tout le temps différemment des autres. Mais c’est comme ça que je me sens la plus honnête en fait. Je ne me suis jamais rien laisser imposer et il est pas né celui qui me forcera à faire quelque chose que je ne veux pas faire.

Ma sœur me dit tout le temps ‘je comprends rien à tes goûts, t’es dure à suivre’. Mais oui mais c’est parce que même moi je connais pas mes goûts. Enfin ce que je veux dire c’est que je fonctionne au coup de cœur, au gros boum qui me dit si j’aime ou si j’aime pas. Je n’ai pas de norme, pas de convention, je suis spontanément spontanée.

En vieillissant, j’ai fait la paix avec moi-même, j’ai gommé quelques trucs qui étaient compliqués à gérer socialement parlant, comme la paranoïa ou la jalousie en amitié (véritables tueuses de relations ces deux-là). Un jour j’ai décidé que je ne voulais plus d’elles dans ma vie. Et bim, coup de pied au cul, elles ont dégagé. Parfois elles reviennent me faire un coucou mais c’est vraiment très exceptionnel.

Je crois que j’aime bien la personne que je suis aujourd’hui.

Aujourd’hui, j’ai 33 ans.